Composer Harmoniser

L’heure de la rentrée scolaire sonne ! Tous ceux qui sont concernés, professeurs comme élèves, ont repris leur cartable et pour ce qui nous concerne, leur instrument et leur cahier de musique.

Cette année encore fleuriront, dans les cours de solfège, quelques perles : « les instruments à persécution », « les doubles cloches » et autres « points d’ogre ».

Ces authentiques appellations ont été obtenues et conservées par ma collègue Marie-Reine Sarraude, altiste et professeure de formation musicale, que je salue pour sa remarquable collection de perles musicales !

Pour ce qui me concerne, je vais commencer l’année en vous parlant d’un personnage musical digne de réflexion dont le nom est OCTAVE.

Faisons connaissance 

Octave est un terme qui qualifie un intervalle entre deux sons. Sa racine signifiant huit, il s’attribue à toute distance entre deux notes aux extrémités d’une série de huit notes conjointes sans tenir compte des notes altérées. 

L’octave peut se présenter mélodiquement, c’est ce qu’on appelle un saut d’octave comme, par exemple, les deux premières notes du refrain d’ »Over the Rainbow » composé par Harold Arlen. L’octave harmonique sépare deux sons prononcés en même temps.

Sa particularité vient du fait qu’il est le seul intervalle simple entre deux notes qui portent le même nom.

Italienne naturalisée française

Le mot français octave vient de l’italien, véritable langue de la musique. Dans cette langue, il se prononce ottava, qui signifie huitième. Autrement dit, huitième note dans l’ordre des degrés d’une gamme à partir de la tonique. 

Attention ! En français comme en italien, une octave est un mot féminin  et non masculin ! Il faut dire, par exemple, nous avons chanté à 2 voix  « un’ottava bellissima », une très belle octave. 

Qualifications des octaves 

Comme les autres intervalles, l’octave existe en plusieurs « tailles ».

1. L’octave juste (5 tons et 2 demi-tons diatoniques) est omniprésente dans toute la littérature musicale. Le dernier accord du Ier degré de la tonalité principale, par exemple, comprend la plupart du temps une doublure de sa basse, la tonique qui forme une octave.

2. L’octave diminuée (4 tons et 3 demi-tons diatoniques) est beaucoup plus rare surtout mélodiquement. Les 2 notes portent le même nom, mais une des deux est altérée. En tant qu’intervalle harmonique un très bel exemple est donné par Maurice Ravel qui fait sonner la sensible si dièse en même temps que la sous-tonique si bécarre puis la# avec la bécarre dans son concerto en sol (mouvement lent* 2e mesure du chiffre 2). (*article sur le mouvement lent du concerto en sol)

3. L’octave augmentée (6 tons et 1 demi-ton diatonique). Les deux notes portent le même nom, mais une des deux est altérée. Cet intervalle semble ne pas exister dans certaines théories musicales. Pourtant Michel Legrand l’a popularisé harmoniquement dans le célébrissime air des Parapluies de Cherbourg : « Je ne pourrai jamais vivre sans toi ».

L’intervalle harmonique naturel 

L’octave a le plus simple rapport de fréquences possibles 2/1. Dans l’ordre des sons harmoniques produits par un son fondamental, c’est le premier naturellement perceptible. 

Il suffit qu’un homme et une femme chantent la même chanson, par exemple « Les parapluies de Cherbourg » pour que, naturellement, ils produisent une série d’octaves justes harmoniques. La distance naturelle entre la voix masculine et la voix féminine est précisément l’octave juste.

C’est ainsi que la clé moderne utilisée par les ténors, en lecture de leur partition, est la même que celle des sopranos. La seule différence est un petit huit indiqué sous la clé des ténors qui signifie que chaque note de cette portée va sonner une octave juste plus bas.

On appelle cette clé une clé octaviée. Les guitaristes par exemple jouent en clé de sol octaviée. Ceci leur permet d’atteindre leurs sons les plus graves (corde de mi) sans avoir besoin de la clé de fa.

Les signes pour octavier

Enfin, pour faciliter la lecture de notes placées dans l’aigu et le suraigu ou dans le grave et l’extrême grave, des abréviations sont utilisées.

• 8 va = octava alta (le « a » pour alta) qui, comme le signale la théorie Danhauser, est une déformation française impropre, mais d’un usage très courant d’ottava alta. Il faut jouer l’extrait souligné au-dessus une octave plus haut
• 8 vb = octava bassa (le « b » pour bassa). Il faut jouer l’extrait souligné par en dessous une octave plus bas
• 15a = jouer 2 octaves plus haut
• 15b = jouer 2 octaves plus bas.

Pour ces deux dernières abréviations, notons qu’en matière de perles il arrive de trouver chez de très sérieux éditeurs l’erreur 16a ou 16b. Un simple calcul permet de s’apercevoir qu’une double octave n’est pas une 16e, mais une 15e. 

Et, comme c’est la rentrée, j’en profite pour vous souhaiter une excellente année scolaire… s’il vous arrive de trouver dans mes article une coquille – même si ce n’est pas une perle – ne manquez pas de me le signaler : tout le monde peut se tromper !