Je réponds aujourd’hui à une question que s’est posé Michel en suivant ma formation 1 « La création musicale au clavier — Initiation pratique ». J’y affirme une notion très connue dans l’agencement des tonalités : toute gamme Majeure a une gamme relative mineure placée une 3ce mineure en dessous d’elle.
Tout n’est pas relatif
Voici la question : pourquoi cette gamme est-elle placée une 3ce mineure en dessous et pas à un autre intervalle ?
D’après le ROBERT historique de la langue française, le mot relatif (1370) qualifie un terme dont l’idée comporte un rapport avec un autre terme. Toute gamme mineure est donc relative à une gamme majeure en ce sens qu’elle a un rapport étroit avec elle.
Dans un langage plus actuel, je parlerai de ces deux gammes comme d’un binôme spécifique. Quel est donc ce lien qui les relie l’une à l’autre ?
LA TONALITE MAJEURE : sa gamme représentative
Chacune des 12 tonalités Majeures différentes, véritables couleurs musicales dépend des sons qui la composent. Ces sons, agencés du grave vers l’aigu (le contraire est tout aussi vrai tel un escalier que l’on monte ou descend), se présentent sous la forme d’une gamme.
… ses degrés mélodiques et harmoniques…
Chaque note de la gamme (ou marche de l’escalier) est nommée degré mélodique. Chaque degré porte un nom et un numéro (en chiffres romains).
Ces 7 degrés différents peuvent devenir des degrés harmoniques, basses d’accords à 3, 4 sons ou plus utilisant les notes de la gamme et présentés en empilement de 3ces à l’état fondamental resserré.
Je peux résumer cette tonalité, en enchaînant le Ve et le Ier degré. C’en est la signature tonale.
…son nom et sa signature…
Quand j’annonce le nom d’une tonalité je fournis 2 indications : exemple DO Majeur,
- le nom de sa tonique DO, son de repos qui termine la plupart du temps une mélodie dans cette tonalité. Il est aussi la basse du dernier accord du Ier degré marquant presque toujours la fin de la composition en musique tonale.
- Le nom de son mode, Majeur, qui qualifie l’enchaînement typique des tons et demi-tons entre ses degrés, véritable ADN musical du mode commun aux 12 tonalités du mode.
… ses degrés principaux et secondaires…
Je peux distinguer les degrés de la gamme Majeure par leur fonction.
a) I, IV et V : Il est à remarquer que dans le mode Majeur, trois degrés harmoniques sont occupés par des accords à 3 sons parfaits Majeurs (3ce Majeure et 5te juste) en parfaite adéquation avec la couleur du mode : les degrés I, IV et V. Ce sont les degrés principaux utilisés aux moments clés.
Le Ve degré, dont la 3ce est la sensible de la tonalité, se renforce souvent d’une 7e mineure pour constituer l’accord essentiel de toute tonalité : l’accord de 7e de dominante.
b) II, III et VI : trois autres degrés enrichissent le mode Majeur par leur différence. Ce sont des accords parfaits mineurs (3ce mineure et 5te juste) constituant les degrés secondaires. De sonorité un peu plus sombre, ils sont utilisés avec subtilité et dosage soigneusement pensé établissant un contraste avec la couleur Majeure.
c) Un degré contient une quinte diminuée plus délicate à placer. Il est très souvent employé comme 7e de dominante (donc Ve degré) sans sa fondamentale.
Les tonalités voisines : des espaces de modulation
Bien entendu, quand nous jouons, écoutons ou lisons une composition, et à plus forte raison quand nous composons, nous constatons qu’il est agréable de moduler par rapport au ton principal annoncé par l’armure. C’est-à-dire passer d’une tonalité à une autre.
Les modulations les plus accessibles sont celles qui sont proches du ton principal. Par exemple, dans le même mode Majeur, celles qui ont une gamme représentative n’ayant qu’une altération de différence avec l’armure du ton principal. Ce sont les tonalités voisines Majeures.
Il y en a toujours deux, dont la tonique est placée une 5te au-dessus et une 5te en dessous de la tonique initiale, par exemple en DO Majeur :
Et les gammes relatives dans tout cela ?
J’en viens maintenant à la question qui nous occupe aujourd’hui : les gammes relatives. S’il y a bien une gamme voisine de TOUTE GAMME MAJEURE, dans laquelle il est facile et agréable de moduler, c’est SA GAMME RELATIVE MINEURE.
Attachons-nous à comprendre les liens qui les relient l’une à l’autre :
1°) Elles ont la même armure et les mêmes notes, mais pas les mêmes degrés.
Comment est-ce possible ?
C’est possible parce qu’elles n’ont pas la même tonique. La gamme mineure relative d’une gamme majeure est décalée de deux degrés vers le bas. Ainsi l’ordre des tons et demi-tons est lui aussi décalé, ce qui explique qu’elle appartient à un autre mode que le mode Majeur : le mode mineur.
2°) Elles ont les mêmes accords, mais leurs fonctions sont inversées.
Les accords parfaits mineurs secondaires de la gamme Majeure, sur les degrés II, III et VI sont bien là. Mais ils sont devenus principaux car positionnés sur les degrés I, IV et V. La couleur générale mineure, plus sombre l’emporte. Cela justifie bien le nom général du mode : mode mineur !
À l’inverse, les degrés principaux de la gamme Majeure, I, IV et IV sont devenus secondaires : III et VI et VII. Utilisés avec subtilité et dosage soigneusement pensé, ils deviennent un contraste plus clair pour la couleur générale mineure.
Enfin, le IIe degré de cette gamme mineure (ex-VIIe de sa gamme Majeure relative) possède une 5te diminuée, sonorité délicate souvent employée en préparation du Ve degré.
3°) Un lien fait défaut : la signature tonale
Voici pourquoi je pense que ce binôme des modes Majeurs et mineurs relatifs a dominé la littérature musicale du baroque au romantisme : c’est l’ajout artificiel de la sensible en mineur.
En effet, vous avez certainement remarqué que le mode mineur obtenu par décalage du mode Majeur relatif n’a plus de sensible. Les demi-tons décalés en II-III et V-VI ne permettent plus au VIIe degré de fonctionner comme une sensible. D’ailleurs, on appelle ce degré sous-tonique.
Qu’à cela ne tienne : dans l’accord du Ve degré en mineur, on altère la sous-tonique qui redevient sensible. Ceci explique pourquoi cette altération artificielle ne se trouve pas à l’armure. Par la même on peut user d’une signature tonale qui fonctionne exactement comme en Majeur.
La 3ce mineure
Je termine donc ma réponse à Michel par 3 questions :
Question 1 : Par conséquent, combien y a-t-il de tonalités voisines pour une tonalité Majeure donnée ?
- Réponse : 5 – 2 voisines Majeures, une relative mineure et ses deux voisines mineures – (voir le tableau)
Question 2 : Quel intervalle y a-t-il entre la tonique d’une tonalité Majeure et celle de sa tonalité mineure relative ?
- Réponse : Une 3ce mineure soit 1 ton et ½ ton diatonique.
Question 3 : Pourquoi ?
- Réponse : Parce que c’est le décalage entre les Ier et VIe degrés (en descendant) de la gamme Majeure.
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